Pierre Molinier, né le à Agen et mort le à Bordeaux, est un photographe, un peintre et un poète français
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Il est surtout connu pour ses tableaux érotiques et pour ses photomontages, mises en scène de son propre corps et autoportraits travestis, où s'expriment son culte de l'androgynie[1] et son fétichisme des jambes[2].
Son œuvre singulière et énigmatique a influencé, au début des années 1970, les artistes européens et nord-américains du body art, et continue de retenir l'attention des artistes, des critiques et des collectionneurs d'aujourd'hui.
Vie et œuvre
En 1919, Pierre Molinier s’établit à Bordeaux comme artisan peintre. Il exercera ce métier de peintre en bâtiment jusqu'en 1960.
Passionné par le dessin et la peinture, il pratique la peinture artistique en parallèle.
Des années 1920 à la fin des années 1940, sa peinture est figurative et présente des thèmes classiques: paysages du Lot-et-Garonne, natures mortes, portraits — notamment de sa fille Françoise — et autoportraits. Son travail d'après nature ainsi que sa recherche de structure, de couleur et de lumière dans les paysages le rapprochent de l'impressionnisme, tandis que ses portraits évoquent plutôt l'expressionnisme. Membre de la Société des Artistes Indépendants Bordelais à partir de 1928, il expose régulièrement lors de ses salons.
Rupture et approche des surréalistes
Fin 1951, lors du XXe Salon des Indépendants bordelais, il présente Le Grand Combat, un tableau mi-abstrait mi-figuratif évoquant des corps contorsionnés et des membres enlacés. Cette peinture jugée indécente sera voilée lors de l'exposition et devient le motif d'une rupture fracassante avec la société bordelaise. (Le Grand Combat, devenu entre-temps la propriété de l'homme politique français Roland Dumas, sera « dévoilé» par Jacques Saraben qui a bien connu Pierre Molinier lors du Soixantenaire des Indépendants Bordelais à la Galerie du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux en 1989.)
Début 1955, Molinier envoie des reproductions de ses tableaux ainsi que des poèmes à André Breton. Celui-ci lui réserve un accueil enthousiaste[4], l'assure de son soutien[5] et propose de l'exposer à Paris[6]. Pierre Molinier expose 18 toiles à la galerie À l'Étoile scellée[7], du au , dont Le Grand Combat, Succube, Comtesse Midralgar, Les dames voilées; le catalogue est préfacé par Breton.
Par la suite, Molinier compose la couverture du 2enuméro de la revue Le Surréalisme même puis, convié par Breton, expose une toile à la 8eExposition inteRnatiOnale du Surréalisme[8] dédiée à Éros.
Membre du groupe surréaliste de 1955 à 1969[9], Pierre Molinier reste cependant en marge du surréalisme. Breton prend ses distances après avoir reçu de Molinier une carte de vœu trop pornographique[réf.souhaitée].
Érotisme et mise en scène du corps précurseurs de l'art corporel
À partir des années 1960, Pierre Molinier se consacre entièrement à son œuvre plastique et photographique, notamment aux autoportraits par un procédé de photomontage.
Son procédé consiste à prendre des photographies de lui-même apprêté — épilé, maquillé, souvent masqué d'un loup et vêtu de quelques accessoires noirs: guêpière ou corset, gants, bas et escarpins à talons aiguilles, parfois voilette ou résille ou chapeau haut-de-forme — ainsi que des photographies d'amis et des clichés de mannequins, puis à découper les silhouettes ou des éléments de corps et à les recomposer dans une photographie finale du collage, image idéale de lui-même[10].
Pierre Molinier se concentre sur son propre corps et son œuvre se voue entièrement à l'érotisme. En témoignent un court-métrage de Raymond Borde en 1962 (Molinier, 21 min), qui sera projeté publiquement à Bordeaux en 1966 lors du Festival Cinématographique organisé par Alain Natalis et Jean-Pierre Bouyxou (dont l'affiche reproduit l'oeuvre de Pierre Molinier intitulée Le Grand Combat N°2), et un entretien réalisé par Pierre Chaveau en 1972 publié en 2003.
En 1974, Pierre Molinier participe à l'exposition Transformer. Aspekte der Travestie qui a lieu au Kunstmuseum de Lucerne (Suisse). À la suite de cette exposition, il prend contact avec l'artiste Luciano Castelli dont il réalise, à Bordeaux, une série de photographies. L'année suivante, il rencontre Thierry Agullo, un autre jeune artiste qui devient, en même temps qu'un ami intime, le modèle privilégié de deux autres séries: la première sur le thème de l'indécence[11]; la seconde, sur le thème de l'androgyne, constituée de 60 clichés de Thierry Agullo en Thérèse pris fin [12].
Pierre Molinier se donne la mort en se tirant une balle de pistolet dans la bouche le .
En , Artcurial organise une vente aux enchères de la très importante collection Emmanuelle Arsan de ses œuvres.
Expositions et collections publiques
Expositions monographiques
Molinier. Peintures, photos et photomontages, Centre Georges-Pompidou, Paris, au
Pierre Molinier, 50 photographies et photomontages érotiques, galerie À l'Enseigne des Oudins, Paris, 1996
Pierre Molinier, IVAM, Valence (Espagne), 1999
Pierre Molinier photographe. Une rétrospective, galerie Kamel Mennour, Paris, au
Pierre Molinier 1946-1966, 2 décennies magiques, galerie À l'Enseigne des Oudins[13], Paris, au
Pierre Molinier. Jeux de miroirs, Musée des beaux-arts de Bordeaux, au
Pierre Molinier, Comme je voudrais être, Galerie Christophe Gaillard, Paris, au
Pierre Molinier, Vertigo, Galerie Christophe Gaillard, Paris, au
Expositions collectives
Fémininmasculin, le sexe de l'art, Centre Georges-Pompidou, Paris, à
Le Miroir du désir. Luciano Castelli, Maison européenne de la photographie, Paris, 1996
Rrose is a Rrose is a Rrose: Gender Performance in Photography, Guggenheim Museum, New York, janvier à
Scènes de la séduction, Rencontres d'Arles, 1998
Surrealism. Desire unbound (Surréalisme. Désir illimité), Tate Modern, Londres, au
Pierre Petit, Molinier, une vie d'enfer (biographie), éditions Ramsay/Jean-Jacques Pauvert, 1992 (ISBN2840410141)
Le Chaman et ses créatures (préface de Pierre Molinier, présentation de Roland Villeneuve), William Blake & Co, 1995 (ISBN2841030334)
Pierre Bourgeade, le Mystère Molinier (Pierre Molinier et ses ami(e)s), coédition Voix Richard Meier/galerie À l'Enseigne des Oudin, 1997
Jean-Luc Mercié, Pierre Molinier, Bartschi Salomon Editions, Genève, hiver 1999.
Années 2000
Jean-Luc Mercié, Pierre Molinier photographe, une rétrospective (catalogue d'exposition), édition Galerie Kamel Mennour, 2000 (ISBN2914171021)
Entretiens de Pierre Molinier avec Pierre Chauveau - 1972 (texte et enregistrement sur CD audio), Pleine Page, 2003 (ISBN2908799626)[19]
Pierre Molinier, je suis né homme-putain (écrits et dessins présentés par Jean-Luc Mercié), Biro éditeur, 2005 (ISBN2351190033)
Pierre Molinier. Jeux de miroirs (collectif, catalogue d'exposition), Le Festin, 2005 (ISBN291526225X)
Jacques Abeille, Pierre Molinier: présence de l'exil, Pleine Page, 2005 (ISBN2913406203)
Henri Maccheroni, Un après-midi chez Pierre Molinier, Pleine Page, 2005 (ISBN2913406181)
Pierre Petit, Pierre Molinier et la tentation de l'Orient, Pleine Page, 2005 (ISBN291340619X)
Claude Esturgie, Questions de genre ou le genre en question: de Pierre Molinier à Pedro Almodovar, Leo Scheer, 2008
Années 2010
Jean-Luc Mercié, Pierre Molinier, coédition Kamel Mennour/Les presses du réel, 2010 (ISBN9782840663386)
Moi, Petit Vampire de Molinier (interview de Michelle Sesquès, introduction et notes de Pierre Petit), Éditions Monplaisir, 2012 (ISBN9791091213011)
Vincent Labaume, La photo n'est pas sensible (à partir de l'œuvre de Pierre Molinier), Éditions Confluences / Frac Aquitaine, 2013
Molinier Chaveau Entretien (réédition du texte paru en 2003, sans l'enregistrement sur CD audio), Pleine Page, 2013
Moi, Petit Vampire de Molinier (interview de Michelle Sesquès, introduction et notes de Pierre Petit, nouvelle édition révisée et enrichie), Pleine Page, 2015 (ISBN9782360420247)
Filmographie
1964: Molinier de Raymond Borde
1965: Mes jambes, court métrage réalisé par Pierre Molinier
1968: Satan bouche un coin de Jean-Pierre Bouyxou
1968: Chromo Sud, court-métrage réalisé par Étienne O'Leary dans lequel apparait Pierre Molinier.
2013: Les Jambes de Saint-Pierre[20] de Dominique Roland
Théâtre
Mes jambes, si vous saviez, quelle fumée… (adaptation d'entretiens de Pierre Molinier avec Pierre Chaveau en 1972), mise en scène de Bruno Geslin, avec Pierre Maillet (dans le rôle de Pierre Molinier), Jean-François Auguste et Élise Vigier. Théâtre de la Bastille, Paris, 2004, dans le cadre du 33e Festival d'automne à Paris; théâtre Romain Rolland, Villejuif (France), 2006.
Molinier (adaptation d'entretiens de Pierre Molinier avec Pierre Chaveau en 1972), Cie du Théâtre du Pont Tournant[21], mise en scène de Stéphane Alvarez, avec Jean Bedouret, Jean-Marc Foissac, Frédéric Kneip, Patrice Manouvrier. Théâtre du Pont Tournant, Bordeaux, 2003; Divan du Monde, Paris, 2003; Théâtre du Pont Tournant, Bordeaux, 2005. Reprise de la pièce, Cie du Théâtre du Pont Tournant, mise en scène de Stéphane Alvarez, avec Jean Bedouret, Jean-Marc Foissac, Frédéric Kneip, Thierry Rémi. Théâtre du Pont Tournant, Bordeaux,
Notes et références
Une de ses œuvres photographiques titrée Androgynie est conservée par la Maison européenne de la photographie.
La photographie Pierre Molinier fétiché est conservée par le Fonds régional d'art contemporain d'Aquitaine.
«Votre magnifique envoi d'hier […] procure un frisson sans cesse renouvelé et cela me donne toute la mesure de leur pouvoir magique.», «Vous êtes aujourd'hui le maître du vertige […]», lettre d'André Breton à Pierre Molinier du 8 avril 1955, archives municipales de Bordeaux.
«Soyez sûr, cher Pierre Molinier, que vous n’avez dans le surréalisme que des amis», lettre d'André Breton du 8 juin 1955, archives municipales de Bordeaux.
«Si la galerie À L’Etoile Scelléee rouvre, comme je l'espère, après les vacances, je vous offrirai d'y exposer vers la fin de l'année ou au début de l'année prochaine», lettre d'André Breton à Pierre Molinier du 24 décembre 1955, archives municipales de Bordeaux.
Cette galerie, dont André Breton assurait la direction artistique, était située au 11, rue du Pré-aux-Clercs dans le 7earrondissement de Paris. « La galerie À l'Étoile scellée », article de Renée Mabin, Centre de recherche sur le surréalisme de l'université Paris III, dont le 19eparagraphe porte sur Molinier [lire en ligne]
L'exposition a eu lieu du 15 décembre 1959 au 29 février 1960 à la galerie Daniel Cordier, 8 rue de Miromesnil à Paris. Celle-ci a édité le catalogue BOITE ALERTE. MISSIVES LASCIVES. Exposition inteRnatiOnale du Surréalisme 1959-1960 (1959).
Le photomontage titré Comme je voudrais être est reproduit dans le catalogue d'exposition Pierre Molinier. Jeux de miroirs, Le Festin, 2005, page 56.
Publications dans le numéro 21/23 de la revue arTitudes en mai 1975 et sous la forme d'un recueil à tirage limité édité par la galerie À l'Enseigne des Oudins en 1975.
Thérèse a fait l'objet d'une première exposition posthume dans le cadre du Mois de la Photo à Paris en 1982.
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