Didier Pierre Chamizo, dit Chamizo, est un peintre contemporain français né le à Cahors (Lot) qui vit à Paris depuis 1991. Considéré comme l'un des précurseurs du street art, il a créé l'Abstraction-Figuration lettrique.
1951-1967 - La prime jeunesse
Didier Chamizo est né le 15 octobre 1951 à Cahors[1]. Il arrive à Saint-Étienne en 1958. Il commence à travailler à l’usine à 13 ans mais l’avenir qui se dessine ne plaît pas du tout à l’adolescent qui, déjà attiré par l’art, s’inscrit aux cours du soir de l’École des Beaux-Arts en 1967. L’année suivante, à 17 ans à peine, il expose à la Maison de la culture de Saint-Étienne. Les bases de son art, qui évoluera considérablement sur le plan formel, sont déjà jetées, et ainsi résumées par l’écrivain et peintre Demosthenes Davvetas : « Dans ces toutes premières œuvres apparaissent les caractéristiques essentielles de son langage : l'amour de la couleur et la qualité, la précision du dessin, le besoin impérieux d'exprimer ce qui lui tient à cœur sur un mode intense et généreux qui embrasse le rêve, l'absurde, la fonction subversive du logos, enfin l'attitude critique face à la société et à l'existence humaine. »
1968-1991 - La révolte, l’incarcération, la naissance de l’Abstraction-Figuration lettrique
Bientôt attiré par le mouvement de révolte prolétarienne alors en plein essor, Chamizo part en guerre contre la société et s’implique dans tous les combats libertaires de son temps, allant jusqu’à détruire sa production artistique (300 peintures et dessins, des centaines de poèmes) qu’il considère alors comme l’émanation d’une vie bourgeoise dont il veut se défaire. Il entre dans la clandestinité et soutient les groupuscules armés en Europe.
Cette lutte le conduit derrière les barreaux pendant deux longues périodes durant lesquelles :
· il peint, énormément, durant dix années ;
· il expose les toiles peintes en prison, malgré son impossibilité, bien sûr, à être physiquement présent sur les lieux d’exposition ;
· il reçoit de nombreuses visites et des soutiens au plus haut niveau, notamment celui d’Alain-Dominique Perrin, alors président de Cartier international, ou de François Reichenbach qui lui consacre un portrait ;
· en 1989, le ministère de la Culture le nomme lauréat du Bicentenaire pour sa série "Révolution", programmée dans 6 villes.
De 1986 à 1989, Chamizo redonne vie au magazine L'Écrou, premier magazine réalisé en prison, en y assurant les fonctions de rédacteur en chef, de pigiste et surtout d’illustrateur. Les parloirs du détenu tiennent plus du salon que de la geôle. Des journalistes viennent y interviewer ce phénomène : René Deroudille, éminent critique d’art, découvre le peintre et salue dans un article la série " Liberté ".
Durant l’été 1988, il dirige une équipe de détenus et peint avec eux l’intégralité du couloir souterrain qui relie les prisons Saint-Joseph et Saint-Paul. Là, sur le mur de béton, il créera son premier " Quatre en cellule ".
C’est durant cette période d’incarcération que Chamizo développe l’Abstraction-Figuration lettrique, consistant à imbriquer des mots dans ses toiles ou sur des carcasses de téléviseurs, tel un JonOne qui aurait eu 20 ans d’avance. Ces mots à haute teneur symbolique sont ceux du troisième article de la Déclaration des droits de l’homme, " Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne", reproduits dans toutes les langues. Ses toiles sont exposées à Lyon, à New York et à Paris, où 17 des 19 peintures exposées à la galerie Albert Ier sont vendues le soir même du vernissage.
Durant l’été 1992, il réalise une peinture monumentale de huit cents mètres carrés sur un mur de béton brut implanté en bordure de la rivière Lot, au niveau de la ville de Douelle. Il y relate à sa manière huit mille ans d’histoire du vin, commande du ministère de la Culture et la Fondation Cartier pour l'art contemporain. Puis il s’envole pour la Réunion, invité par Alain Séraphine. Il fera une intervention à l'École supérieure d'art de la Réunion où il peindra en direct, devant les étudiants, deux portes de l’école.
1993 - La grâce
Libéré le 11 novembre 1991 mais en partie interdit de territoire, Chamizo est gracié par François Mitterrand en janvier 1993. Depuis 1991, il vit à Paris.
Depuis 1994 - Les expositions et projets s’enchaînent
Dès 1994, de nombreuses expositions et créations s’enchaînent pour Chamizo, notamment au Musée de la Poste (où il présente dans l'exposition "Plis d'excellence" des lettres d’amour de plus de deux mètres de hauteur, aux côtés de celles de Picasso, Matisse, Artaud...), au cirque Arlette Gruss (pour lequel il réalise, sur une idée d’Yves Mourousi, le rideau de scène), à la Fête de l’Humanité (dont il réalise le fond de scène sur le thème de la danse) ou encore à la féria de Dax (où il présente sa série "Corridas"). Deux galeries parisiennes montrent ses œuvres : Éric de Montbel en mai, puis S. 21, qui expose Jean-Pierre Raynaud, Jean-Jules Chasse-Pot, Richard Di Rosa, décide d’accueillir ses travaux en permanence. La fin de l’année offre à Chamizo l’occasion de renouer avec le grand format qu’il affectionne : Jacques Konckier lui passe commande, pour la fondation Balenciaga, d’une œuvre de deux mètres sur deux, sur le thème de Narcisse.
Début 1996, Chamizo crée une sculpture, Le Livre magique, pour " Livrôtrésors ", exposition organisée par le centre culturel Aragon d’Oyonnax. Il s’associe à " Schizophrénies-Discordances ", une présentation collective qui se tient salle Gaveau, à Paris, aux côtés de Peter Klasen, Erró, Ben, Robert Combas… D’octobre à décembre, Chamizo réside et expose au centre culturel français de Surabaya, en Indonésie. Côté création, sous le pseudonyme " Chamirosa ", des œuvres peintes naissent d’un travail à quatre mains, en collaboration avec le sculpteur Richard Di Rosa, d’après les contes et les légendes du monde entier. En septembre, " Ma mythologie du cinéma " célèbre le festival du cinéma américain de Deauville, au casino.
En 1998, Chamizo participe à " 80 artistes autour du Mondial ", une exposition collective organisée par la galerie Enrico Navarra, à Paris, avec Francesco Clemente, Jeff Koons, César, Arman, Niki de Saint Phalle, Kenny Scharf... Chamizo s'attaque alors à Saint-Etienne à un nouveau mur dont le thème est " Planète Foot ", commande de la ville. Une fois encore, l’artiste renoue avec le public ce contact direct qu’il apprécie tant. Passants et automobilistes le rencontrent autour de son " atelier-échafaudage " et suivent pendant quatre semaines la réalisation d’une œuvre d’art contemporain, en pleine rue. L’année 1998 se clôt sur une nouvelle exposition stéphanoise, à la galerie Les Tournesols, où Chamizo présente ses tableaux aux côtés des sculptures de Richard Di Rosa.
Une grande rétrospective lui rend hommage en 1999 au musée Henri-Martin de Cahors.
En 2008 à Paris, il édite une lithographie avec Art Estampe où il fera connaissance avec plusieurs artistes dont Alainjuno et l'éditeur galeriste Patrick Gigou (Galerie Scarbo et Forum des Arts).
L'exposition «Attentat à la couleur», organisée en 2012 par la galerie Berthéas Les Tournesols, à Saint-Etienne, est couronnée de succès.
En 2016, la Galerie Seine 51 lui consacre une exposition présentant ses dernières œuvres[2].
Parallèlement à cette intense activité artistique, Chamizo demeure un être humain engagé des actions humanitaires et pédagogiques :
- il mobilise amis et artistes lors du conflit yougoslave et donne de nombreuses œuvres à l’Académie des beaux-arts de Sarajevo
- il intervient lors de conférences sur le milieu carcéral, notamment avec le Président de la cour de cassation Pierre Truche. Missionné par le ministre de la Justice sur le thème de l’art et de la prison, il collabore à divers ouvrages sous la direction de Christian Carlier, historien du ministère de la Justice. Il a également été l’illustrateur et l’invité d’honneur du colloque international sur l’application des peines en Europe de l’Est et de l’Ouest orchestré par Jean-Pierre Dinthillac.
- le 4 février 2016, une Harley Davidson peinte par Chamizo pour la Fondation Womanity[3], consacrée à l'émancipation des femmes et filles défavorisées, a été vendue aux enchères à Genève pour 145 000 € lors d'un gala de charité ayant rapporté 2,3 millions d'euros.
Quelques citations de Chamizo :
Quelques citations sur Chamizo :
« Je considère Chamizo comme l’un des dix meilleurs peintres figuratifs de sa génération. »
« Toute la peinture de Chamizo est une déclaration d’amour à l’homme, certes sans illusion et, comme Molière, il châtie les mœurs en riant ! En hurlant de rage aussi ! Quelle puissance ! »[4]
« Chamizo peint comme moi je pose des bombes. »
« Le château de Versailles a eu la sereine idée d'installer, voilà quelques années dans ses murs, devant ses glaces miroirs et sous ses dorures séculaires, les personnages et les représentations peintes ou sculptées d'un Murakami ou d'un Jeff Koons. C'était à la fois extravagant et superbe. Moi, sans aller chercher au Japon ou aux États-Unis, les œuvres époustouflantes d'autres maîtres de l'art international, chantés par les revues et encensés par le Marché de l'Art, j'y verrais bien, aussi, un jour, les créations de ce maître français qu'est Didier Chamizo. »[5]
« Loin (…) de la figuration libre, la liberté de figurer de Chamizo conduit à la création de nombreux figuroïdes météoriques, issus du monde de la rue. (…) Ces figures sortent des limites du cadre et donnent l'impression d'un théâtre d'ombres, de marionnettes, d'une chorégraphie, d'un décor ludique, d'un joyeux mélange de sculpture et de peinture. (…) Comme l'artiste le souligne lui-même, il "fait acte de peindre en détruisant le langage pour dire ce qu'il a à dire". Très proches des jeux électroniques et vidéo, de la réalité virtuelle, de la publicité et de la télévision, les créations de Chamizo révèlent un sens de l'espace et de la matière. »[6]
« Chamizo a pour moi fait du "Banksy" vingt ans avant Banksy ».[7]