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Grandville, ou Jean-Jacques Grandville, pseudonyme de Jean Ignace Isidore Gérard, né le à Nancy et mort le à Vanves, est un caricaturiste, illustrateur et lithographe français.

Grandville
Portrait par Émile Lassalle, 1840.
Naissance

Nancy
Décès
(à 43 ans)
Vanves
Nom de naissance
Jean-Ignace-Isidore Gérard
Autres noms
Jean-Jacques Granville - Jean de Granville
Nationalité
française
Activité
Dessinateur, aquarelliste, caricaturiste, lithographe, peintre
Lieu de travail
Paris (-)
Mouvement
Symbolisme

Biographie



Enfance et formation


Jean Ignace Isidore Gérard est né à Nancy, dans l’est de la France, dans une famille d’artistes et de comédiens. Homme aux identités multiples, il sera toujours appelé Adolphe par les siens, du prénom d'un jeune frère mort deux mois avant sa naissance :

« C’est ainsi qu’il entonne ce long duo avec la mort qui naît d’un baptême endeuillé, modulé tout au long de sa vie dans les registres divers des œuvres qu’il crée et des sorts qu’il subit. »

Ernest Bussière, buste de Grandville, 1893, parc de la Pépinière, Nancy.
Ernest Bussière, buste de Grandville, 1893, parc de la Pépinière, Nancy.

C’est à Nancy qu’il grandit et reçoit ses premières leçons de dessin de son père, musicien amateur mais surtout peintre miniaturiste « pour la tête, la fleur ou le paysage ». La misère règne alors à Nancy et la vie du foyer des Gérard n’y est pas facile : outre le couple et ses quatre enfants, il y vit une aïeule, Marie-Anne, ancienne « comédienne du Roi » dont les récits nostalgiques relatifs aux fastes de la cour de Stanislas fascinent. Le théâtre ne suffisait pas à la subsistance des époux Gérard  les grands-parents paternels de Grandville  qui s’installent Place Royale et exploitent l’un des premiers cafés de Nancy, le café de la Comédie. Hippolyte, le frère d’Adolphe, verse dans la littérature et adopte le pseudonyme de « Gérard Grandville ».

En tant qu'artiste, Adolphe adopte Jean-Jacques comme prénom et reprend également de ses grands-parents le nom de « Grandville ». Il signe donc J.J. Grandville[1]. Il semble suivre les traces de son père et s’attache à dessiner les membres de sa famille, le spectacle de la rue et, progressivement, s’émancipant des principes inculqués, se fait une spécialité de « défigurer avec malice ces physionomies que l’adulte met tout son art à figurer. »

Son talent de caricaturiste s’affiche précocement. L’opposition au père entre pour quelque chose dans cette velléité de transgression, mais on peut y voir également le dépassement du simple apprentissage. L’influence de l’art du théâtre y entre certainement pour autre chose, mais il faut évoquer l’histoire de l’art, fortement empreinte à Nancy de l’art de Callot qui fit connaître les Arlequin, les Pantalon et les Polichinelle. Enfin, la mode et l’influence de la caricature, très populaire en Angleterre, jouent pour partie.

Grandville s’initie en recopiant les modèles de caricatures qu’il trouve dans la nouvelle presse satirique comme Le Nain jaune. Il se forge une opinion libérale, anticléricale. Dès 1820, il conçoit des créatures hybrides, mi-hommes mi-animaux, qui deviendront rapidement la marque de son talent. Au dessin, il associe volontiers les jeux de mots teintés d’ironie : Le Canard, dessin illustrant les « canards » de la clarinette ; Le Quintette à vent évoquant l’expression « souffler comme un bœuf », etc.

Le courant romantique commence à s'imposer en France à cette époque et ne manque pas d’influencer l'artiste. La lithographie, nouvelle technique d’impression et de représentation, connait du succès et contribuera singulièrement à la gloire de Grandville. L’appel de la capitale se fait sentir : le départ sera soutenu par le peintre miniaturiste Léon Larue (1785-1834), connu sous le nom de Mansion, qui détecte le talent de Grandville et le fait venir dans son atelier parisien.


Une vie marquée par les deuils familiaux


Plaque commémorative, rue Grandville à Saint-Mandé.
Plaque commémorative, rue Grandville à Saint-Mandé.

À l'âge de vingt et un ans, Grandville s'installe à Paris.

Le , il épouse sa cousine Marguerite Henriette Fischer (1810-1842) et déménage dans un nouvel appartement. Leur premier fils, Ferdinand, naît en 1834, mais ne vit que quatre ans. Cette naissance affaiblit considérablement Henriette. Un deuxième fils, Henri, vient au monde à l'automne 1838, mais meurt en 1841, étouffé en mangeant un morceau de pain, en présence de ses parents. Georges, son troisième fils, naît en . Lors de ses grossesses précédentes, et cette fois encore, la santé d'Henriette s'est détériorée et elle décède le même mois d'une péritonite.

En , Grandville se remarie avec Catherine Marceline (« Céline ») Lhuillier (1819-1888). Armand, le seul enfant de ce deuxième mariage, naît en 1845. Georges, le troisième fils de son premier mariage, âgé de 4 ans et demi, meurt en janvier 1847 après une courte maladie.

Grandville ayant perdu en dix ans sa première femme et les trois enfants qu'il en a eus est physiquement et mentalement brisé. Il tombe malade à plusieurs reprises.

En 1847, alors qu'il séjourne dans sa maison de villégiature de Saint-Mandé, il est atteint d'une crise de folie et est transporté dans une clinique de Vanves. Le pressentiment de sa mort ne le quitte pas, il l’annonce, en dépit de l’avis des médecins et, en effet, le , deux mois après la mort de son fils chéri Georges, Grandville meurt. Conformément à ses vœux, il sera enterré à Saint-Mandé  où une rue porte aujourd'hui son nom  aux côtés de sa première épouse et de leurs trois fils.


Son œuvre



Caricaturiste


Grandville excelle dans l'imagerie animale.
Grandville excelle dans l'imagerie animale.
Les pompiers au travail.
Les pompiers au travail.

Peu de temps après son arrivée à Paris, Grandville publie un recueil de lithographies intitulé Les Tribulations de la petite propriété. Il poursuit son œuvre avec Les Plaisirs de tout âge et La Sibylle des salons, un jeu de tarot de 52 cartes qui sera finalement signé par Mansion. Mais c'est avec Les Métamorphoses du jour (1828-29), une série de 70 scènes dans lesquelles des personnages humains sont représentés avec une tête d'animal en situation pour un rôle dans la comédie humaine, qu'il s’est vraiment fait connaître. Ces dessins sont remarquables par l'extraordinaire habileté du dessin des expressions humaines transposées sur une figure animale. La physiognomonie, courant intellectuel inspiré des travaux de Lavater, de Cuvier, de Geoffroy Saint-Hilaire et de Gall postule l’analogie entre les traits du visage, la complexion d’un individu et son caractère, sa personnalité. Cette thèse et les courants analogues (craniologie, phrénologie etc.) alors en vogue ont une répercussion indubitable sur la pensée et l’œuvre de Grandville.

Les Métamorphoses du jour ont, dès leur première apparition, suscité des imitations de la part d’autres artistes, ce dont Grandville ne manque pas de se plaindre, mais ces plagiats témoignent de l’influence qu’a son œuvre sur l’évolution de l’illustration fantastique. Le succès rencontré par ces œuvres a conduit divers périodiques tels que La Silhouette, L'Artiste, La Caricature, Le Charivari à l’engager comme collaborateur. Ses caricatures politiques caractérisées par une merveilleuse fécondité d’inspiration satirique, suscitent bientôt l'engouement.

Ses planches satiriques sont des charges contre les contemporains ou des attaques contre la monarchie de Juillet. Ses dessins déplaisaient à Adolphe Thiers, qui fait promulguer, en 1835, sous le règne de Louis-Philippe une loi exigeant une autorisation préalable pour la publication de dessins et de caricatures. Après ce rétablissement de la censure, Grandville, viscéralement attaché à la liberté de la presse, se sent profondément atteint par les attaques incessantes de la police ; il est même perquisitionné et la fouille désordonnée opérée par les gendarmes le heurte profondément. Dans une caricature toute personnelle, il s’en souviendra en figurant les gendarmes sous la forme de mouches agaçantes envahissant son domicile.


Illustrateur de livres


Après cet épisode, il se tourne presque exclusivement vers l'illustration de livres, en illustrant divers ouvrages, tels que les œuvres d’Honoré de Balzac, les chansons de Béranger, les Fables de La Fontaine (1838) et celles de Florian, Don Quichotte de Cervantes, les Voyages de Gulliver de Swift, Robinson Crusoé de Daniel Defoe. Il a également continué à publier des recueils de lithographies : Les Cent Proverbes, Un autre monde (1844), Les Fleurs animées. Il participe aux illustrations des Scènes de la vie privée et publique des animaux (1840-1842), une satire initiée par Jules Hetzel en référence à La Comédie humaine, et au Diable à Paris.


Style


Un univers zoomorphe.
Un univers zoomorphe.
Les animaux de Granville.
Les animaux de Granville.

Son œuvre s'apparente à un monde étrange que Baudelaire compare par la suite à « un appartement où le désordre serait systématiquement organisé ». Ses dessins fantastiques et zoomorphes (métamorphoses d’êtres humains, d’animaux et de plantes) (Un autre monde) lui valurent d’être revendiqué par les surréalistes.

Les dessins de Grandville présentent habituellement une analyse des personnages pleine d’inventivité et de merveilleux. Cependant, il faut insister sur la difficulté de lecture et d’interprétation de ses caricatures intrinsèquement liées au contexte historique et politique du temps, à une actualité désormais hermétique pour le profane. Cette perte relative du sens n’ôte rien à la qualité artistique des dessins.

L’une des obsessions de Grandville dans l’approche de ses œuvres est de vouloir absolument transcrire sa pensée par le trait du crayon plus que par la plume et le verbe. Il invente tout un ensemble de procédés « pour donner parole aux images, afin qu’elles manifestent l’idée, affichent l’opinion et agissent immédiatement sur le lecteur. » La monarchie de juillet lui fournira amplement l’occasion d’exprimer ses idées républicaines et anticléricales. Les thèmes du budget, des violences du pouvoir, du ridicule et des abus des puissants sont autant de sources d’inspiration pour Grandville qui ne néglige pas l’observation quotidienne de ses contemporains plus proches, croquant les types du bourgeois, de la coquette, du notaire, etc.


Œuvres


À la mort du dessinateur, une grande partie de ses dessins revient à son fils et exécuteur testamentaire Armand Grandville. En 1893 et 1894, ce dernier partage la collection entre le Musée des beaux-arts de Nancy (1 432 dessins), le Musée lorrain (58 dessins), la Bibliothèque publique de Nancy (522) et la Bibliothèque nationale de France à Paris (15 dessins).

Quelques années après la mort de Grandville, en 1853, 1 168 dessins sont mis en vente par la famille de l’artiste. Deux importantes ventes, le et le , dispersent encore les œuvres. 200 dessins et un millier d'estampes ont rejoint les collections de la Bibliothèque municipale de Nancy par le biais du legs Thiéry-Solet en 1921.

Le musée Carnavalet à Paris conserve un cahier de croquis et un album de 50 dessins et aquarelles. À l’étranger, le musée national de Varsovie compte 29 compositions attribuées à l’artiste. D’autres dessins sont conservés dans des collections privées.


Sélection d’œuvres


Illustration pour le journal La Caricature, 1830.
Illustration pour le journal La Caricature, 1830.
Illustration pour Le Loup et le Chien de La Fontaine.
Illustration pour Le Loup et le Chien de La Fontaine.
Illustration extraite de Un autre monde, 1844.
Illustration extraite de Un autre monde, 1844.

Expositions



Postérité


Une promenade dans le ciel.
Une promenade dans le ciel.
Métamorphoses du jour, œuvres de Grandville utilisées comme cartes de tarot.
Métamorphoses du jour, œuvres de Grandville utilisées comme cartes de tarot.

L’univers merveilleux et étrange de Grandville a inspiré nombre d'artistes après lui, depuis les surréalistes jusqu’aux artistes contemporains : Marcel Broodthaers, César, Dado[6], Fred Eerdekens, Max Ernst, Jan Fabre, Francisco Goya, On Kawara, Odilon Redon, Paul Van Hoeydonck, Koen Vanmechelen, Panamarenko et Angel Vergara.

Sa modernité a dépassé les limites de l’art graphique et a influencé notre culture de l’image. Chaplin, Willy Kessels, Serge Vandercam, les frères Lumière, Méliès, Ladislas Starevitch en sont des exemples[7].

Sur la pochette de l'album Innuendo du groupe de rock Queen (1991) figure une illustration de Grandville. Un jeu de tarot, The Fantastic Menagerie Tarot, basé sur des illustrations de Grandville, a été édité en 2006.

La bande dessinée britannique uchronique steampunk Grandville, créée par Bryan Talbot en 2009, s'inspire de l'univers graphique de l'artiste.


Notes et références



Sources


Les informations biographiques proviennent de :


Références


  1. Voir sur le site de la galerie Troncin-Denis.
  2. Illustration de Grandville dans le Magasin pittoresque, 1841, Gallica.
  3. « Fables de La Fontaine », sur galeries.limedia.fr, édition Fournier de 1838-1840 illustrée par J. J. Grandville (format image).
  4. Site des éditions Douin.
  5. « Les Fleurs animées », sur galeries.limedia.fr, édition Gonet de 1847 illustrée par J. J. Grandville (format image).
  6. Cf. Le Double Portrait de Grandville.
  7. Texte modifié de la présentation de l'exposition temporaire Un autre monde, J.-J. Grandville et ses contemporains au musée Félicien Rops à Namur, du 25 juin au 11 septembre 2011.

Annexes


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Bibliographie



Mentions contemporaines


Ouvrages de référence


Articles


Liens externes



На других языках


[de] Grandville

Grandville (* 13. September 1803 in Nancy; † 17. März 1847 in Vanves bei Paris; eigentlich Jean Ignace Isidore Gérard) war ein französischer Lithograf, Maler und Zeichner, dessen beruflicher Werdegang eng verbunden war mit den unruhigen politischen Verhältnissen in der ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts in Frankreich. Zur Zeit der Julimonarchie arbeitete er mit großem Erfolg als politischer Karikaturist für die oppositionellen Zeitschriften La Caricature und Le Charivari in Paris. Nach 1835 machte er sich einen Namen als Illustrator klassischer und zeitgenössischer Literatur. Sein formales Hauptmotiv war die anthropomorphe Tier- und Pflanzendarstellung: er zeichnete Mischwesen aus Teilen von Menschen, Tieren und Gewächsen, um bestimmte Eigenschaften der Dargestellten zu charakterisieren. Das Gesamtwerk Grandvilles besteht aus rund 3000 Zeichnungen. Sein Privatleben verlief unglücklich, dem frühen Tod in geistiger Verwirrung ging eine Reihe von Todesfällen in der engeren Familie voraus.

[en] Jean Ignace Isidore Gérard Grandville

Jean Ignace Isidore Gerard was a 19th century French illustrator and caricaturist who published under the pseudonym of Grandville. He has been called "the first star of French caricature's great age",[1] and Grandville’s book illustrations described as featuring "elements of the symbolic, dreamlike, and incongruous, and they retain a sense of social commentary."[2] "His perverse vision sought the monster in everyone and took delight in the strangest and most pernicious transfigurement of the human shape ever produced by the Romantic imagination."[3] The anthropomorphic vegetables and zoomorphic figures that populated his cartoons anticipated and influenced the work of generations of cartoonists and illustrators from John Tenniel, to Gustave Doré, to Félicien Rops, and Walt Disney. He has also been called a "proto-surrealist"[2] and was greatly admired by André Breton and others in the movement.
- [fr] Grandville

[ru] Гранвиль, Жан

Жан Инья́с Изидо́р Гранви́ль (настоящая фамилия Жерар, фр. Jean Ignace Isidore Gérard, по прозвищу Grandville; 13 сентября 1803, Нанси, — 17 марта 1847, Ванв, О-де-Сен) — французский рисовальщик-иллюстратор.



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