Il est notamment l'auteur de la célèbre statue de la Liberté (dont le titre exact est La Liberté éclairant le monde), offerte par la France aux États-Unis et érigée en 1886 sur Bedloe's Island, à l'entrée du port de New York; il est aussi l'auteur du groupe Les Fleuves et les Sources allant à l'Océan de la fontaine Bartholdi, située place des Terreaux, à Lyon, ainsi que du monumental Lion de Belfort, qui célèbre la résistance héroïque de la ville lors du siège de 1870-1871, et également du Monument à Vercingétorix à Clermont-Ferrand. Ses rares peintures sont généralement signées du pseudonyme d'«Amilcar Hasenfratz[1]».
Biographie
Né à Colmar le , Frédéric Auguste Bartholdi est le fils de Jean Charles Bartholdi (1791-1836), conseiller de préfecture, et d’Augusta Charlotte, née Beysser (1801-1891), fille d'un maire de Ribeauvillé. Quatre enfants, dont seuls l'aîné, Jean-Charles (avocat-éditeur, puis interné pour maladie), et le cadet, Auguste, survivront. À la mort de son père en 1836, la mère, de condition aisée, décide d'aller vivre à Paris, tout en conservant la maison familiale du 30, rue des Marchands, qui abrite, depuis 1922, le musée Bartholdi, après avoir été léguée à la Ville en 1907.
De 1843 à 1851, il étudie au lycée Louis-le-Grand à Paris. Parallèlement, sa mère l'inscrit comme élève dans l'atelier du sculpteur Antoine Étex et du peintre Ary Scheffer, rue Chaptal (aujourd'hui musée de la Vie romantique, qui y conserve deux bronzes, La Gravure et L’Orfèvrerie). Ce dernier décèle chez Bartholdi que sa vocation est dans la sculpture. Auguste Bartholdi obtient son baccalauréat en 1852 et un an plus tard, afin qu'il s'installe, sa mère lui achète un atelier, rue Vavin, qu'il occupera pendant quarante ans. De 1855 à 1856, il voyage avec ses amis Édouard-Auguste Imer et Jean-Léon Gérôme en Égypte, où il découvre la sculpture monumentale, puis en Arabie heureuse. Il en rapporte des dessins et photographies orientalistes qui l'influenceront[2].
Son premier monument, une sculpture en bronze dédiée au général Rapp, est inauguré au Champ-de-Mars de Colmar le [3].
Pendant la guerre franco-allemande de 1870, chef d'escadron des gardes nationales, il est aide de camp du général Giuseppe Garibaldi et agent de liaison du gouvernement, particulièrement chargé de s'occuper des besoins de l'armée des Vosges. C'est au cours de cet engagement patriotique que Garibaldi et Gambetta le confortent dans son amour de la république et de la démocratie. Très marqué par l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine par l'Empire allemand, il veut dès lors exalter les valeurs de la liberté[4].
En 1871, à la demande d'Édouard Lefebvre de Laboulaye —dont Bartholdi a réalisé un buste en 1866— et de l'union franco-américaine, il effectue son premier voyage aux États-Unis pour sélectionner en personne le site où sera installée la statue de la Liberté. Le projet ressemblera d'ailleurs beaucoup à un projet semblable (L'Égypte éclairant l'Orient), qui aurait dû être installé à l'entrée du canal de Suez, si Ismaïl Pacha l'avait accepté en 1869[5].
Sa carrière prend dès lors une ampleur internationale. Il devient un des sculpteurs les plus célèbres du XIXesiècle en Europe et en Amérique du Nord.
Il réalise de 1875 à 1879, le Lion de Belfort, sculpture monumentale en haut-relief située à Belfort en France au pied de la falaise de la citadelle. L'œuvre représente un lion couché sur un piédestal en rocaillage, la patte posée sur une flèche qu'il vient d'arrêter. Cet animal symbolise la résistance de la ville assiégée par les Prussiens durant la guerre de 1870, et à l'issue de laquelle la zone, correspondant à l'actuel Territoire de Belfort, sera la seule partie de l'Alsace à rester française.
Voulant exalter la portée universelle du message républicain, il est franc-maçon depuis 1875, adhérent à la loge Alsace-Lorraine à Paris[6]. C'est à partir de cette date qu'il commence la construction de la statue de la Liberté dans ses ateliers parisiens, rue Vavin. La pose de la première pierre du piédestal le , est d'ailleurs une cérémonie maçonnique: c'est le grand-maître de la Grande Loge de l’État de New York, William A. Brodie(en), qui la pose, rappelant que les loges l'ont aidé dans son projet[7].
La même année, le , il conclut un mariage «rocambolesque» avec Jeanne-Émilie Baheux de Puysieux, simple modiste mais descendante d'une grande famille alsacienne, posant pour lui, qui se serait rajeunie de 13 ans aux yeux de son mari, à l'hôtel de ville de Newport (Rhode Island) aux États-Unis. Lors de son séjour chez son ami John LaFarge, ce dernier le convainc en effet de l'épouser afin de se conformer aux valeurs morales des hommes d'affaires américains qui financent sa statue de la Liberté. LaFarge fait ainsi venir chez lui le pasteur Charles T. Brooks pour célébrer dans la précipitation un mariage improvisé[8]. Leur mariage sera cependant heureux et sans enfant[9].
À Rouen au mois de , il surveille le chargement des caisses, de la statue démontée, sur la frégate de transport Isère. À l'invitation du commandant Gabriel Lespinasse de Saune il embarque, avec son épouse, sur le navire pour la descente de la Seine, les époux débarquent à Caudebec-en-Caux, avant que le bateau entreprenne la traversée de l'Atlantique[10].
Il effectuera un autre voyage aux États-Unis sur La Bretagne (CGT)[11] pour l'inauguration, le , de la statue de la Liberté à New York.
Il est élevé au grade de commandeur de la Légion d'honneur en 1886, 22 ans après avoir été nommé chevalier[12].
Auguste Bartholdi meurt de maladie le en son domicile au no82, rue d'Assas dans le 6earrondissement de Paris[13]. Il est inhumé à Paris au cimetière du Montparnasse (28edivision)[14]. Le service funèbre, comme celui en 1914 de sa veuve, a été présidé par leur ami le pasteur Jules-Émile Roberty, du temple protestant de l'Oratoire du Louvre.
L'année suivante en 1905, sa veuve lègue la statue de Champollion en plâtre réalisée par son mari pour l'Exposition universelle de 1867 au musée de Grenoble. Cette statue consignée dans le musée ne sera finalement installée dans la cour d'honneur du lycée Champollion qu'en 1926[15]. Elle est aujourd'hui exposée dans la salle 17 du musée.
Œuvres
Bartholdi est l'auteur de 35 monuments de par le monde, parmi lesquels:
le Monument à Martin Schongauer à Colmar (1863);
les quatre anges trompettistes à l’église unitarienne baptiste de Boston aux États-Unis (1874)[16];
La Fayette arrivant en Amérique à Union Square à New York, aux États-Unis (1876)[17];
la fontaine du Capitole, au parc Bartholdi à Washington, aux États-Unis (1878);
le Lion de Belfort à Belfort en France (1880) (dont une réplique réduite est érigée sur la place Denfert-Rochereau à Paris);
le Monument à Diderot, érigé sur la place Diderot de Langres en 1884;
La Liberté éclairant le monde, plus connue sous le nom de statue de la Liberté, à New York, aux États-Unis (1886)[18]. Des réductions se trouvent à l'extrémité sud de l'île aux Cygnes à Paris (inaugurée en 1885, avant celle de New York), au musée d'Orsay de Paris, dans l'église du musée des arts et métiers de Paris (modèle d'exécution en plâtre au 1/16 daté de 1878) et sur le parvis du musée (moulage en bronze), dans le jardin du Luxembourg à Paris, à l'entrée de la ville de Colmar, à Roybon (Isère) sur la place principale (offerte à ce village par Bartholdi), à Poitiers sur la place de la Liberté (ancienne place du Pilori), sur la place Portalis de Saint-Cyr-sur-Mer (réplique en fonte, dorée par la suite) et une plus petite en Normandie, à Barentin;
La Saône emportant ses affluents, dit fontaine Bartholdi, sur la place des Terreaux, à Lyon en France (1892)[19];
le Monument à la Suisse secourant les douleurs de Strasbourg pendant le siège de 1870[20], à Bâle en Suisse (1895);
la Victoria à l'ancien cimetière de Birr en Suisse (1899), monument de sépulcre de 22 soldats de l'armée de Bourbaki, morts en 1871[21];
le Monument à Champollion, en marbre (1875) dans la cour du Collège de France à Paris[22].
De nombreux monuments et statues à Colmar, dans le Haut-Rhin (France):
le Monument du général Rapp (1860); la statue est présentée dans le cadre de l'Exposition universelle de 1855 aux Champs-Élysées avant de rejoindre la place Rapp à Colmar;
le Monument à Martin Schongauer au musée Unterlinden (1863) avec les statues allégoriques de L'Orfèvrerie, L'Étude, La Gravure et La Peinture (provenant de la fontaine que surmontait la statue), conservées au musée Bartholdi à Colmar. Un modèle réduit, en bronze, de L'Orfèvrerie (1861), est conservé au musée de la Vie romantique à Paris[23].
le Monument de l’amiral Armand Joseph Bruat au Champ-de-Mars (1864), détruit par les Allemands en septembre 1940, restitué en 1958; il représente l'amiral flanqué de figures allégoriques;
le Génie funèbre, bronze de 1866 dans l'escalier du lycée Bartholdi[24];
le Petit Vigneron alsacien musée Bartholdi) (1869), copie au marché couvert;
le Monument funéraire de trois Gardes nationaux tombés en 1870, cimetière du Ladhof (1872); deux dalles disjointes laissent passer le bras d'un combattant cherchant à agripper la baïonnette qui lui a échappé[25];
le Monument à Roesselmann (1888), fontaine;
le Monument à Gustave-Adolphe Hirn (1894);
le Monument au baron Lazare de Schwendi, fontaine sur la place de l'Ancienne-Douane (1898);
Les Grands Soutiens du monde, groupe en bronze de 1902 au musée Bartholdi, présenté au Salon de Paris en 1902;
le Tonnelier alsacien, couronnement de la maison des Têtes (1902);
De nombreux monuments sont également visibles ailleurs en France et dans le monde:
le Monument au général Arrighi de Casanova, à Corte (1867)[26];
le Monument à Christophe Colomb, à l'Exposition universelle de 1893 de Chicago, localisation inconnue[33];
le Monument funéraire du sergent Ignace Hoff, au cimetière du Père-Lachaise (4eDivision)[34];
le Monument à La Fayette et Washington, square Thomas-Jefferson, à Paris (1895)[35], et sa copie à Lafayette square de Manhattan (New-York), en 1900[36].
le Tombeau d’Auguste Bartholdi (co sculptée par Auguste Rubin) au cimetière du Montparnasse à Paris[37].
Monuments détruits:
Monument des aéronautes (1885), élevé en 1906 à la mémoire des aéronautes (Gambetta et 30 aérostiers) pendant le siège de Paris de 1870, au rond-Point de la Révolte, à Neuilly (aujourd'hui à Paris —depuis l'annexion de 1929—, place du Général-Koenig), envoyé à la fonte en 1941 par le régime de Vichy[38];
Fontaine Bartholdi (1885), place de la République à Reims, détruite pendant la Première Guerre mondiale[39].
La Liberté lampadaire (1889) à Saint-Affrique (Aveyron); fondue sous l'Occupation et remplacée par une autre statue de la Liberté en 2006, oeuvre d' André Debru[40].
Plusieurs projets ne virent pas le jour:
pour le palais Longchamp à Marseille, qui ne sera pas retenu, mais dont le lauréat Henri Jacques Espérandieu (1829-1874) s'est inspiré;
L'Égypte éclairant l'Asie, projet monumental pour l'entrée du canal de Suez, 1867, dont il adaptera l'idée pour la statue de la Liberté[41];
un projet pour Callao, destiné à la République du Pérou.
un projet de monument en l'honneur de Thiers et Denfert-Rochereau à Belfort[42].
un nouvel exemplaire en bronze du Martyr moderne, érigé en mars 2005 dans la cour du palais royal de Varsovie, en Pologne, fondu d'après le modèle original en plâtre[43] (Salon de 1864, conservé au musée Bartholdi de Colmar), symbolisant le drame polonais relatif aux événements de 1863 entre la Russie et la Pologne;
une statue de la Liberté fondue en 2012 pour remplacer celle du jardin du Luxembourg, à la suite de la décision du Sénat de transférer la réduction originale de 1889 au musée d'Orsay à Paris.
Le Monument aux aéronautes du siège de Paris (1906, détruit en 1942), Neuilly-sur-Seine, rond-Point de la Révolte.
Prix Bartholdi
Le prix Bartholdi est une récompense visant à développer l'ouverture internationale d'enseignements universitaires dans le Rhin supérieur (F-D-CH).
Numismatique
Auguste Bartholdi figure sur une pièce de 10 € en argent, éditée en 2012 par la Monnaie de Paris, pour représenter sa région natale, l'Alsace[44].
Notes et références
Ses sculptures sont signées de son véritable nom, semble-t-il pour que celui-ci reste exclusivement attaché à sa réputation de sculpteur ((en) Darcy Grimaldo Grigsby et Hackforth-Jones, Jocelyn (ed.) and Roberts, Mary (ed.), Edges of Empire: Orientalism And Visual Culture, Blackwell Publishing Ltd, , 240p. (ISBN978-1-4051-1689-3, DOI10.1002/9780470773901.ch2, lire en ligne), «Out of the Earth: Egypt's Statue of Liberty», p.38–69).
Pierre Vidal, Frédéric-Auguste Bartholdi, 1834-1904, Créations du Pélican, , p.32.
Philippe Jéhin, Rapp. Le sabreur de Napoléon, La Nuée bleue, , p.276.
Bartholdi, Société d'histoire et d'archéologie de Colmar, , p.73.
Pierre Vidal, Frédéric-Auguste Bartholdi, 1834-1904, Créations du Pélican, , p.31.
Une stèle en terre cuite de Bartholdi, datée de 1874 et représentant le mystère d'Isis, a fait naître l'hypothèse d'une initiation antérieure dans une loge de rite maçonnique égyptien (cf. Régis Hueber, «Mystère d'Isis: une sculpture maçonnique d'Auguste Bartholdi (1834-1904), au musée Bartholdi de Colmar», La Revue du Louvre et des musées de France, vol.52, no4,).
(en) Barry Moreno, The Statue of Liberty Encyclopedia, Simon & Schuster, , p.186.
Bertrand Lemoine, La Statue de la Liberté, Mardaga, , p.106.
Christian Blanchet, Bertrand Dard, The Statue of Liberty: The First One Hundred Years, American Heritage, , p.48.
Ulanne Bonnel (ill.André Hambourg (peintre de la Marine)), «La statue de la Liberté traverse l'Atlantique», Cols bleus, no1879, , p.8-13 (lire en ligne, consulté le ).
Liste des passagers, il est en compagnie de Ferdinand de Lesseps, d'hommes politiques et de journalistes français.
[«Cote LH/128/45», base Léonore, ministère français de la Culture Dossier Bartholdi, Base Léonore].
Vincent Brocvielle, «Liberté. Bartholdi. Éclairer le monde», dans Pourquoi c’est connu? Le fabuleux destin des icônes du XIXe siècle, Réunion des musées nationaux-Grand Palais, (ISBN9782711864331), p.92-95
Projet initialement destiné à la place des Quinconces à Bordeaux.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Jacques Betz " Bartholdi ", Éditions de Minuit, Paris, 1954
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(en) Leslie Allen, Liberty: The Statue and the American Dream (ASIN:B000HMACQI).
(en) Serge Hochain, Building Liberty: A Statue is Born, Washington, D.C, National Geographic, (ISBN978-0-7922-6765-2)
(en) Moreno Barry, The Statue of Liberty Encyclopedia, New York, Simon & Schuster, 2000, (ISBN1597640638).
(en) Betsy Maestro et Giulio Maestro, The story of the Statue of Liberty, New York, Mulberry Books, , 48p. (ISBN978-0-688-08746-3)
(en) Marc Tyler Nobleman, The Statue of Liberty: First Facts: American Symbols, Mankato, Minn, Capstone Press, , 24p. (ISBN978-0-7368-4703-2, présentation en ligne).
Roman évoquant la construction de la Statue de la liberté.
René Sellal, Les alsaciens et l'Amérique du XVIesiècle au début du XXesiècle, Mulhouse, Bulletin de la Société Industrielle de Mulhouse, , 144p. (ISSN0037-9441)
Bulletin n°2 de 1985. Les voyages d'Auguste Bartholdi aux États-Unis, par Pierre Burger, pp. 123 à 130
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