Jacques Georges Rigaut, né le dans le 7earrondissement de Paris[1] et mort par suicide le à Châtenay-Malabry (Seine), est un écrivain dadaïste français.
Fils d'un cadre du grand magasin Le Bon Marché, il est d’abord un élève brillant au lycée Montaigne, où il obtient un prix de récitation et de français, puis il devient passable et dissipé au lycée Louis-le-Grand où il se fait remarquer par son excentricité.
En , il devance l'appel et s'engage dans l'armée afin de pouvoir choisir un secteur moins dangereux. D'abord affecté au service automobile à Paris, il part au front dans l'artillerie lourde, en Lorraine, au début de l'année 1918. Après l'armistice, il reste sous les drapeaux jusque fin 1919. De retour à Paris, il commence à fréquenter les milieux littéraires et devient l'ami de Drieu la Rochelle, qui fera de lui le héros de La Valise vide, puis du Feu follet et de L'Adieu à Gonzague. Il rencontre le peintre mondain Jacques-Émile Blanche, qui l'engage comme secrétaire.
Ses premiers écrits, Propos Amorphes, sont publiés en 1920 alors qu'il entre en contact avec les membres du groupe Dada.
Dandy désargenté, vivant chez ses parents, il devient un grand consommateur d’opium, de cocaïne et d'héroïne. En 1922, il rejoint Tristan Tzara et quitte les surréalistes.
En 1924, il rencontre Gladys Barber, une jeune Américaine fortunée qu’il suit à New York. Il rentre à Paris peu après, avant de repartir pour New York début 1925. Bien qu'il vive dans des conditions matérielles pénibles, il y fréquente les milieux aisés et élégants, et épouse Gladys Barber le , mais elle le quitte rapidement, lassée de sa toxicomanie. De plus en plus esclave de l'héroïne et de l'alcool, il vit misérablement à New York jusqu’en , date à laquelle il revient subitement en France et reprend une vie mondaine dans une maison prêtée par le surréaliste Paul Chadourne.
En 1929 il entreprend une série de cures de désintoxication, infructueuses, en clinique à La Malmaison, puis en août à Saint-Mandé. En octobre, il entre dans une maison de repos à Châtenay-Malabry appelée «La Vallée aux loups» (qui fut la maison de Chateaubriand). Après avoir passé une soirée à Paris avec un vieil ami, Jacques Porel, le matin du Jacques Rigaut rentre à Châtenay-Malabry, où il se suicide d’une balle de revolver tirée en plein cœur. Il est enterré le au Cimetière de Montmartre, 32e division, avec sa cousine Marcelle Chantal.
Regard sur l'œuvre
Jacques Rigaut est à bien des égards un précurseur d'une forme d'écriture fragmentaire. On le verra notamment dans la publication de ses aphorismes dans la revue Little review en 1923.
Lord Patchogue. La Nouvelle Revue Française n°203, , Paris. Réédition Les éditions du Chemin de fer, 2011, avec des illustrations de Frédéric Malette et une postface de Jean-Luc Bitton.
Papiers Posthumes. Au "Sans Pareil", , Paris.
Agence Générale du Suicide. Jean-Jacques Pauvert, 1959, Paris.
Agence Générale du Suicide. Éric Losfeld, Le Terrain vague, 1967, Paris.
Écrits. Édition établie et présentée par Martin Kay, N.R.F. Gallimard, 1970, Paris.
Ce cadavre exquis, écrit à six mains, date sans doute de 1926. On le suppose rédigé lors d'une nuit arrosée au Café de Madrid à Guéthary. Dédié au «Chinois Inconnu», ce court texte multiplie provocations et impertinences diverses.
Le jour se lève, ça vous apprendra, Éditions Cent Pages, Coll. Cosaques, 2009.
Lord Patchogue, Editions du chemin de fer, postface de J.-L. Bitton, illustrations de Frédéric Malette, 2011.
Agence Générale du Suicide, suivi de Lord Patchogue, Je serai sérieux comme le plaisir, Roman d'un jeune homme pauvre, Pensées et aphorismes. Voix d'encre, 2015, Montélimar.
Peinture
Quoi, Qui, Quand, trois tableaux exposés au salon Dada de 1921.
Cinéma
Emak Bakia. Film 35mm, noir et blanc. Durée 7 minutes. Cinépoème réalisé par Man Ray. Interprété par Rose Wheeler, Kiki et Jacques Rigaut. 1926.
Louis Malle se réfère à Jacques Rigaut lorsqu'il tourne en compagnie de Maurice Ronet le film Le Feu follet. Il le cite comme point de départ de ce premier film vraiment personnel austère et essentiel et résume sa situation en décrivant un adolescent à qui la vie d'adulte est impossible à concevoir et dont le suicide est un choix de vie[2].
Télévision
Dans la série télévisée américaine Criminal Minds (en VF "Esprits criminels") - dont tous les épisodes commencent et se terminent par une citation - l'épisode 4 de la saison 1, intitulé "Plain Sight" (en VF "Les Yeux Dans Les Yeux"), commence par cette citation de Jacques Rigaut: "Don't forget that I cannot see myself. My role is limited to being the one that looks in the mirror." (n'oubliez pas que je ne peux pas voir qui je suis, et que mon rôle se limite à être celui qui regarde dans le miroir).
Quelques citations de l'auteur
«Le merveilleux n'est pas rare, l'incrédulité est plus forte que les miracles.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«Essayez, si vous le pouvez, d'arrêter un homme qui voyage avec son suicide à la boutonnière.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Pensées
«On n'a qu'une chose à soi, c'est son désir.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«Les amours de mes amis sont mes amours.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«La vie ne vaut pas le coup qu’on se donne la peine de la quitter.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«Je serai un grand mort.»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«Il n’y a de progrès, de découverte que vers la mort, il n’échappe à personne que l’adage tous les chemins mènent à Rome est une sorte de calembour, Rome ne pouvant signifier que mort que l’on a retourné .»
—Jacques Rigaut - Extrait des Écrits
«Le suicide doit être une vocation.»
—Jacques Rigaut - Extrait Littérature
Bibliographie
Anon, «Jacques Rigaut», La Révolution Surréaliste, n° 12,
Jean-Luc Bitton, dossier « Salut à Jacques Rigaut (1898-1929) », texte biographique, présentation correspondances et documents inédits, La Nouvelle Revue française, n° 571, Paris, Gallimard, 2004
Jean-Luc Bitton, Jacques Rigaut, le suicidé magnifique, préface d'Annie Le Brun, Paris, Gallimard, coll. « Biographies », 2019
André Breton, Anthologie de l'humour noir, Paris, Sagittaire, 1940; rééd. Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1966
Laurent Cirelli, Jacques Rigaut, portrait tiré, Paris, Le Dilettante, 1998
Patrice Delbourg, «Jacques Rigaut, Brummell suicidaire», in Les Désemparés – 53 portraits d’écrivains, Paris, Le Castor Astral, 1996
Pierre Drieu la Rochelle, Le Feu follet (roman dont le héros Alain s'inspire à la fois de Drieu la Rochelle et de Rigaut), Paris, Gallimard, 1931; rééd. suivi de Adieu à Gonzague (confession dans laquelle Drieu s'adresse à son ami mort), Paris, Gallimard, 1972
Edmond Jaloux, «L'Esprit des livres - Papiers posthumes, par Jacques Rigaut», Paris, Les Nouvelles Littéraires,
Maurice Martin du Gard, Les Mémorables, Paris, Gallimard, N.R.F., 1999
Jacques Porel, Fils de Réjane, t. II, Paris, Plon, 1952
Georges Ribemont-Dessaignes, Déjà jadis ou Du mouvement Dada à l'espace abstrait, Paris, Julliard, coll. « Les Lettres nouvelles », 1958; rééd. Paris, Union générale d’éditions, 10-18, 1973
Michel Sanouillet, Dada à Paris, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1965; rééd. Paris, Flammarion, 1993; Paris, CNRS, 2005
Philippe Soupault, Vingt mille et un jours, entretiens avec Serge Fauchereau, Paris, Belfond, 1980
Philippe Soupault, Mémoires de l'oubli (1914-1923), t. I, Paris, Lachenal et Ritter, 1981
Philippe Soupault, En joue! (roman dont le protagoniste emprunte les traits à la fois de Jacques Rigaut, René Crevel et Pierre Drieu la Rochelle), Paris, Grasset, 1925; rééd. revue et préfacée par l’auteur, Paris, Lachenal & Ritter, 1984
Vincent Teixeira, « Assez, j'y vais, j'y erre - Arthur Cravan, Jacques Vaché, Jacques Rigaut, “trois gais terroristes” dans les lettres françaises », Fukuoka University Review of Literature and Humanities, XLV/I-II,
Alain & Odette Virmaux, Cravan, Vaché, Rigaut, suivi de Le Vaché d'avant Breton: choix d'écrits et de dessins, Mortemart, Rougerie, 1982
Notes
Archives de Paris, état-civil numérisé du 7earrondissement de Paris, registre des naissances de l'année 1899, acte no3 du 2 janvier 1899 (vue 1/2 de la numérisation). L'enfant est né le 30 décembre précédent à 2h du matin au domicile de ses parents situé au no14 du Boulevard Raspail. Il est le fils de Georges-Maurice Rigaut, inspecteur au Bon Marché, et de Madeleine-Berthe Pascal.
Philip French, Conversations avec Louis Malle, Denoël, 1993.
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