La vie d'Adrienne Jouclard se partage essentiellement entre deux points d'attache qui lui sont familialement tracés: la région parisienne et la Lorraine. La première parce que la fonction de son père (mort en 1942), officier de la Garde républicaine de Paris, fait que la famille est installée à Versailles et qu'elle-même y demeurera toute sa vie, la seconde parce que sa mère (morte en 1955), née Tourelle, est originaire de la vallée du Rupt de Mad où les annuels séjours estivaux se perpétuent, faisant naître Adrienne Jouclard le à Onville, village auquel elle restera de même fidèlement attachée. «C'est ainsi», explique Christine Gunther, «qu'Adrienne Jouclard a connu deux espaces de vie différents qui resteront tout au long de son existence de précieuses sources d'inspiration: les paysages du Rupt de Mad et la vie rurale, les travaux des champs[1], les fêtes campagnardes; Paris et ses alentours, les fêtes, les champs de courses, les rencontres sportives[2]».
S'intéressant très tôt au dessin et à la peinture, Adrienne Jouclard, après ses études secondaires, entre en 1899 à l'École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, puis en 1901 à l'École nationale supérieure des beaux-arts où elle est élève de Ferdinand Humbert, s'engageant simultanément vers l'examen au professorat des lycées et collèges qui aboutira à son enseignement du dessin au Cours complémentaire de la rue de Patay et de la rue de Charenton[2].
Jouclard expose à partir de 1907 au Salon des artistes français où une mention honorable lui est attribuée en 1908, une médaille de troisième classe en 1911[3] avec " Labourage en Lorraine". Si le prix Rosa-Bonheur qu'elle emporte en 1914 pour ses compositions animalières est assorti de bourses de voyages, ce n'est qu'après la Première Guerre mondiale —où son père participe à la bataille de Verdun tandis qu'elle-même est infirmière[2]— quelle peut se rendre au Maroc (en 1920 et 1925) et en Tunisie (en 1924) où elle aurait été demandée en mariage par le bey de Tunis[4], mais où surtout elle trouve une source d'inspiration qui lui vaut d'être citée parmi les peintres orientalistes de son temps[5].
L'année scolaire 1940-1941, au terme de laquelle elle met fin à son activité d'enseignante, reste marquée par les dessins qu'elle sollicite des jeunes filles qui sont ses élèves pour représenter la vie quotidienne sous la Seconde Guerre mondiale. Ces dessins constituent «un récit à cent voix d'un moment décisif de l'histoire» et sont aujourd'hui conservés à Rouen au musée national de l'Éducation[6],[7].
Tout en étant installée au 3, rue Campagne-Première dans le 14earrondissement de Paris[8], elle parcourt ensuite, avec sa sœur Camille, la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche, restant cependant fidèle aux séjours à Onville, jusqu'à l'accident de voiture qui survient à Paris et qui, au terme de deux semaines de coma, l'emporte le 14 décembre 1972 à l'âge de 90 ans.
Elle repose à Onville où sa rue natale porte aujourd'hui son nom.
Un art pour tous - Le dessin à l'école de 1800 à nos jours, exposition itinérante conçue par le musée national de l'Éducation, Rouen, 2004[20].
Réception critique
«Dans un cadre, tout une rumeur d'épis froissés, tout un cliquetis de machines, fragiles, aux bras en porte-à-faux comme des pattes d'araignée, tout un bruissement de poitrails dans des blés, tout une chaleur de moisson. C'était précisément La Moisson d'Adrienne Jouclard, toile d'un dynamisme décoratif ardent, d'un puissant réalisme rural.» - Robert Rey, salon des Tuileries de 1925[1]
«Adrienne Jouclard saisit le mouvement dans son essentiel…» - Charles Fegdal[21]
«Adrienne Jouclard ne put rester insensible à ses racines ancestrales car elle exécuta avec talent la civilisation rurale pré-machiniste des régions de l'Est de la France. Dans cette sorte de capharnaüm que fut le lieu où elle aimait peindre et dessiner, plus on y pénètre, plus on s'aperçoit qu'elle préférait les scènes vivantes, vives et violentes aux natures mortes. Dans toutes ses toiles, tout vibre, tout est couleur, et sa peinture est dynamique. Ici, ce sont des boxeurs, des joueurs de rugby, des cavaliers. Les sports sont saisis sur le vif par l'artiste qui veut capter les mouvements. Là, ce sont des fêtes populaires, le cirque, les enfants, les cours de récréation. Adrienne Jouclard a fait précéder ses peintures de nombreux croquis d'après nature, d'études aquarellées, et pour clore le tout elle eut recours à la pointe-sèche si cursive. Dans toutes les scènes, la puissance physique est exaltée et le contraste parfait.» - Dominique Bondu[22]
«Elle utilisait une palette aux tonalités fortes et s'exprimait à travers des formes vigoureuses, très expressionnistes.» - La Gazette de l'Hôtel Drouot[23]
«Appuyée sur une bonne connaissance de l'anatomie humaine et animale, l'œuvre d'Adrienne Jouclard constitue de bons documents pour l'histoire du sport et pour celle des coutumes de sa province natale. Attirée par les attitudes, par les mouvements, elle a fréquenté les terrains de jeux, les champs de courses, les salles de danses…» - Gérald Schurr[24]
«Elle joint à une technique très complète une largeur de vision, une exécution, une puissance qui donne à son œuvre une indiscutable maîtrise.» - Dictionnaire Bénézit[3]
«Elle s'inscrit dans le sillage de Rosa Bonheur dont elle partage le goût pour la campagne, les chevaux, mais aussi la volonté de se démarquer des grandes écoles picturales. Pourtant, elle empruntera aux impressionnistes leur goût du plein air et de la lumière, mais en ne craignant de dissoudre les formes au profit de taches de couleur qui la rapprocheront des fauves et même de l'expressionnisme.» - Michel Marchand[25]
«Spectatrice de tous les rassemblements sportifs, Adrienne Jouclard s'installe près des terrains de jeux, des pistes, et réalise des croquis pour chacun des tableaux en dessinant toutes les attitudes possibles. Capter l'énergie d'une action est son principal langage pictural. Le point de vue adopté illustre cette présence de la peintre au plus près du terrain. Elle apparaît comme un véritable peintre-reporter défiant la photographie pour croquer sur le vif le geste sportif, l'instantané d'une action.» - Claire Vasdeboncoeur[26]
Lynne Thornton, Les Africanistes, peintres voyageurs, ACR Édition, 1990.
Patrick-F. Barrer, L'histoire du Salon d'automne de 1903 à nos jours, Éditions Arts et Images du Monde, 1992.
Gérald Schurr, Le Guidargus de la peinture, Paris, éditions de l'Amateur, , 1069p..
Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, Gründ, 1999.
Jean-Pierre Delarge, «Jouclard, Adrienne», in: Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, Gründ, 2001 (en ligne).
Yves Gaulupeau et Antoine Prost, Dessins d'exode, Éditions Tallandier, 2003.
R. d'Enfert, D. Lagoutte et M. Boyer, Un art pour tous - Le dessin à l'école de 1800 à nos jours, Éditions de l'Institut de recherche pédagogique, 2004.
Marie-Jo Bonnet, Les Femmes artistes dans les avant-gardes, Éditions Odile Jacob, 2006.
Christine Gunther, Catherine Singer, Michel Marchand, À la découverte de Mademoiselle Adrienne Jouclard, Éditions Association Jeanne-d'Arc/ Mairie d'Onville, 2010.
(en) Paula J. Birnbaum, Women artists in Interwar France, Ashgate Publishing Ltd, 2011.
Daniel Gadais, Michel Hachet, André Mertzweiller, La Couleur au service du geste: Adrienne Jouclard (1882-1972), Éditions de la ville de Toul, 2012.
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